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Nos démocraties occidentales

On confond souvent la notion de système démocratique avec celle de système économique ou politique, comme si ces trois mots étaient contenus dans un tout aussi indissociable qu’irréversible. En réalité, toute nation dont le peuple garde la faculté d’orienter ses choix structurels, est, par définition, une démocratie.

 

Il n’en va pas de même lorsque les pouvoirs de l’état sont verrouillés et que la liberté d’expression est réprimée ; on parle alors de dictature et les trois mots évoqués ci-dessus restent effectivement soudés à moins d’une révolution.

 

Dès lors, aussi longtemps qu’un état reste démocratique, c’est bien à sa population, et respectivement à ses élus, qu’il appartient de façonner ses orientations et de les faire évoluer si besoin est.

 

Et il faut bien le dire : nos sociétés occidentales n’ont jamais connu, dans toute l’histoire de l’humanité, de systèmes démocratiques aussi performants et altruistes qu’aujourd’hui. La Grèce antique, certes, avait été pionnière en la matière, mais avec de grosses lacunes au sens égalitaire d’aujourd’hui : aucun droit de vote aux femmes, accès à la citoyenneté des étrangers établis sur sol grec pratiquement impossible et utilisation de l’esclavage à grande échelle. En outre, le modèle-même de la cité athénienne, par le recours systématique à la votation populaire dans un contexte où tribuns manipulateurs et politiciens peu scrupuleux savaient trop bien utiliser les humeurs aléatoires de la population, a fini par l’affaiblir à ce point qu’il a causé sa propre perte face aux menaces de l’extérieur.

 

S’agissant de nos sociétés occidentales plus récentes, on oublie en outre bien trop souvent ce qu’elles ont dû endurer de souffrances et de révolutions pour atteindre le niveau de perfectionnement qu’on leur connaît aujourd’hui. Faut-il aussi rappeler que les dernières dictatures européennes sont encore présentes dans les mémoires, que, voici peu, nos régimes autoritaires mettaient en prison celui qui n’arrivait à payer ses dettes ou, encore plus récemment, que nos épouses n’avaient pas de droit de vote ?

 

Oui, on ne le soulignera jamais assez : nos démocraties occidentales d’aujourd’hui, même si elles souffrent évidemment d’imperfections, sont l’aboutissement d’un très long processus de maturation ; elles sont des chefs-d’œuvre comme l’humanité n’a jamais su en faire, comme par ailleurs elles se montrent complexes et fragiles, nécessitant qu’on veille sur elles et qu’on les adapte aux dangers qui les menacent, fussent-ils venus de l’intérieur ou de l’extérieur.

 

C’est précisément la nature de ces dangers que j’entends développer dans plusieurs des chapitres qui vous sont proposés.

 

 

 

 

Extrait de "Philosophie et lucidité",

par Marc-André Del Pedro

 

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